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une vie de tto
7 janvier 2020

Dans le mille

Dans le millePuisqu'en début 2020 il ne faut rien se refuser, autant invoquer tout de suite les grands auteurs et c'est ainsi que je vais te servir du Hélène Segara : 

...
Méfie-toi du passé
De sa mémoire immense
De ce qu'on croit caché
Quand la vérité danse
Méfie-toi de mes peurs
Qui reviennent parfois
Méfie-toi du bonheur
Souvent il n'attend pas
Méfie-toi de moi
Car parfois ça m'abîme
Tant de fois
Comme si c'était un cri
...

De "Méfie-toi de moi" [une chanson qui aussi une résonance particulière entre Zolimari et moi, une chanson qui appartient à la play-list de notre première soirée ensemble], il faut vraiment retenir une chose : il faut se méfier de moi car tel le chat, et nonobstant ma masse qui autorise à envisager que l'on m'entende arriver, j'ai le chic pour ménager des effets de surprise et prendre de la sorte, par surprise. Oh oui, s'il y a bien un conseil que je peux donner, c'est évidemment de ne jamais me prendre pour un imbécile mais aussi et surtout de se méfier de moi quand j'ai l'air si doux et détaché. Et celui qui a eu à en connaître samedi, c'est mon père.

Sous des airs badins et parce que j'avais décidé de revenir à la charge d'un cadeau de Noël offert à ma mère, j'ai demandé à cette dernière quand est-ce que nous ferions notre test ADN. Ah oui, il faut que je te dise que je lui ai offert cela pour Noël parce que je voulais le faire depuis longtemps et que je trouvais que cela pouvait l'amuser [j'ai encore tapé juste]. Pourquoi le faire ? Par curiosité et parce que je présente un profil qui est particulièrement intéressant pour procéder à cela : mon grand-père maternel n'a pas connu son père et mon propre père n'a aucune idée de l'identité de ses parents biologiques. Tu reconnaîtras que cela fait pas mal de zones d'ombres à élucider, non pas pour mettre des noms dans des cases qui restent vides [je me fiche de savoir qui ils sont] mais pour savoir d'où ils viennent en gros et si j'ai des ascendances régionales différentes de celles de la Normandie ou de la région parisienne [voire de l'Auvergne puisque mon père est né en Auvergne et y a été abandonné quasi immédiatement]. Voilà pour le contexte ...

Or donc [le premier "or donc de l'année 2020 !!!!], afin d'éclairer ces zones obscures, j'ai trouvé rigolo de procéder au test en question malgré toutes les réserves que l'on peut avoir sur le traitement des données collectées et bla bla bla ... mais si tu veux vivre sans risque, tu n'achètes jamais rien sur internet non plus et tu ne m'envoies jamais de photos de ton gros zizi parce qu'on ne sait jamais ce que je pourrais bien en faire [je ne fais que les collectionner et les déverser dans un répertoire enfoui, rassure-toi]. Et j'avais décidé samedi après-midi qu'avec ma Môman nous ferions en sorte de préparer ce test en envoyant les échantillons nécessaires. Sauf qu'après la salade d'endives et avec les encornets du plat principal, mon oeil de fauve a surgi et j'ai entrepris mon père sur le sujet au détour d'une conversation au sujet de l'affaire Matzneff sur les blessures qui ne se réparent pas dans la vie des gens.

- Moi je ne comprends pas qu'au bout d'un moment les gens n'arrivent pas à passer outre ce qui les a blessé plus jeunes !
- Nan mais Pôpa, tu rigoles là ? T'es sérieux vraiment ?
- Bah oui ... au bout d'un moment, il faut passer à autre chose !
- Je rêve et je vais me réveiller ou tu débloques complètement ? Et, par curiosité, c'est quoi l'age au delà duquel on est censé avoir réglé tout un tas de problèmes de jeunesse ?
- Bah ... je pense qu'apèrs 30 ans, c'est bon. Faut passer à autre chose ...
- Hallucinant !
- Pourquoi tu me dis ça Tto ?
- Ah non mais c'est tout simplement hallucinant d'entendre ce que j'entends !!! Toi qui vient expliquer qu'au bout d'un moment il faut passer à autre chose ... toi qui est rongé par un problème d'identité et de racines qui vient me dire qu'au bout d'un moment c'est bon il faut passer à autre chose ?
- Je ne vois pas le rapport ! Moi, j'ai fait mon chemin avec ça. Il y a encore trente ans j'ai cherché et puis c'est bon, j'ai arrêté parce que cela ne m'intéressait plus.
- Alors déjà, si tu cherchais encore il y a 30 ans, la limite des 30 ans est pulvérisée puisque tu en as 70 ! C'est donc bien le signe que certains problèmes peuvent dépasser la trentaine !
- Oui enfin bon ...
- Ah mais non, ce n'est pas aussi simple que cela. D'ailleurs, tu as un autre fils qui n'arrête pas d'expliquer que ses problèmes d'aujourd'hui trouvent leurs origines dans le contentieux qu'il nourrit avec ses parents en vous rendant responsable de tout un tas de choses un peu exagérément de mon point de vue mais c'est sa façon de les gérer. Au surplus, je pense tout de même que quand on a été victime de viol ou d'actes violents, ce n'est parce qu'on a 30 ans qu'on doit jeter un joli mouchoir blanc là dessus et que les plaies doivent cesser de suinter !
- Mouais ... je pense qu'il y a un moment pour tout et qu'après, il faut faire sa vie.
- Oui de toute façon, je me doutais bien qu'il ne fallait pas que je te fasse le cadeau des tests ADN à toi ...
- Euh ... ah ... bah ... pourquoi tu me dis ça Tto ?
- Comment ça pourquoi ? Arrête Pôpa !!! On ne peut pas dire que tu sois à l'aise avec tout ce qui touche à tes origines ! Tu ne t'en rends peut-être pas compte mais ta façon de le gérer est clairement du déni !
- Tu sais, ce n'est absolument pas une question qui me taraude ...
- QUOI ???!!! Nan mais tu rigoles ou quoi ?
- Ah non ... pourquoi tu penses cela ?
- Nan mais tu veux que je te rappelle ce que tu m'as dit la seule fois où tu as accepté d'en parler avec moi ? La seule fois en 44 ans ? Tu m'as expressément expliqué que tu ne voulais pas savoir d'où tu venais, que tu l'avais si mal vécu que tu avais choisi de ne plus en connaître !
- Ah je ne me souviens pas. Ça m'étonne parce que ...
- Ah mais si ! Pôpa, tu as été très clair ! Tu m'as expliqué ce jour là que tu avais très mal pris d'apprendre que tu avais été adopté, que tu es entré en opposition avec tes parents et que tu avais compris que tu ne voulais plus en parler, tout enfouir ... sauf que cela t'a poursuivi.
- Poursuivi ?
- Mais bien sur ! Depuis que je suis tout petit, tu cherches ta place, tu cours après une identité, tu évites tout ce qui te met face à des racines supposées. Sauf que c'est plus fort que toi. Tu ne veux pas l'admettre mais comme beaucoup de personnes dans ton cas, la notion de racine est déterminante ne serait-ce que pour savoir d'où l'on vient. C'est comme cela que l'on se construit et toi tu en arrives à me dire que tu t'es construit hors sol et que tout va bien ? Je n'y crois pas.
- Bah ...
- J'y crois d'autant moins que j'ai plein d'exemples qui démontrent que c'est incohérent. Quand je fais des recherches généalogiques, tu fais semblant d'avoir de la distance mais je vois que tu t'y intéresses. Quand je vais faire la tournée des cimetières dans le Pas de Calais, tu nous racontes des tas d'anecdotes dans la voiture en te déversant presque. C'est extrêmement curieux que tu sois dans le déni comme ça. Après, c'est ta façon de le gérer je te l'accorde. Mais tu ne peux pas me dire que cela ne t'intéresse pas ou que cela ne te travaille pas. C'est évidemment tout le contraire !

La discussion s'est poursuivie, ma Môman était quasiment radieuse parce que j'avais réussi à poser sur la table un sujet que mon père évite depuis plus de quarante ans que je le connais. Je venais de le confronter et ses esquives n'avaient pas produit leur effet traditionnel. Oui, je l'avais ferré, je l'avais serré et je ne l'avais pas lâché.
Au final, il n'a rien mal pris ... il a simplement encaissé. Je sais que cela va faire son chemin, que cela va ouvrir d'autres portes. Je n'ai pas la prétention de régler son problème ni de détenir la solution à celui-ci, ce n'est pas ma cause c'est la sienne. Moi, je vais obtenir dans quelques semaines le résultat de mon test ADN qui ne m'apprendra peut-être pas grand chose mais comme je suis curieux, cela me plaît.

Il faut se méfier de moi ... assurément. Et j'ai un vrai défaut : je cultive profondément cette façon d'être et de procéder.

Tto, terrible

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