Négligence et mésentente

Il m'arrive parfois de ressortir de wikendes exténué parce que j'ai couru dans tous les sens, que j'ai peu dormi ou que sais-je encore. Et puis, il y a des wikendes comme celui qui vient de s'écouler où j'ai le sentiment d'avoir été dans une machine à laver du début à la fin et même plus que la fin puisque le programme essorage a condamné ma nuit en faisant autant de bruit qu'attendu d'un tel programme. Oui, tel que tu me lis ce matin ... j'en ai un peu gros sur la patate de constater qu'en fait, je ne me repose jamais y compris vis à vis de choses sympathiques et simples qui ne devraient pas susciter autant de complications.

Oh bien sur, rien n'est grave tant que l'on en est à devoir regarder des films pourris [dont on sait bien qu'ils le sont mais ... voilà, la déesse télé doit être honorée], tant que l'on prépare un wikende à Londres ou qu'il s'agit de trouver je ne sais quoi à faire la semaine prochaine. Oui, rien n'est grave mais quand tu affrontes déjà des semaines au delà du compliqué depuis plus de deux mois, je t'assure que le moindre grain de sable qui a l'audace de venir se glisser dans les engrenages a de quoi susciter mon hire.

Ainsi donc, qu'il s'agisse de bâtir un programme pour deux jours complets à Londres [ce n'est pas comme si l'on n'y était jamais allé] ou choisir un film dans la myriade de ceux qu'il a téléchargés [sachant que la moitié n'a aucun intérêt ... "La ch'tite famille" ou "Les Tuche 3" c'est bien mais se faire gauler pour des sous-merdes pareilles, faudra m'expliquer], tout n'a été que bras de fer ce wikende. Et moi, j'avoue que je n'ai pas de patience d'autant qu'à chaque bras de fer, j'ai la démonstration que je ne suis pas écouté. De là à avoir l'espoir d'être entendu ...

Trois fois, il aura fallu trois fois que j'explique que Kensington c'était bien le quartier dans lequel se trouve Harrod's, en haussant le ton et en lui montrant sur la carte qu'il avait pourtant sous les yeux ... voilà comment il a enfin compris qu'il commençait vraiment à me casser les couilles. Bon, il aura fallu encore un peu de temps parce que sous couvert de m'attendre pendant que je me calmais à faire un dessert, Môssieur chantait devant des vidéos alors qu'il était censé faire autre chose ... boucler le programme de Londres justement ! Du coup, lorsqu'il a enfin noté que j'étais sur le canapé en train de jouer tout seul alors que nous devions jouer à un jeu de société ensemble, c'est un peu penaud, la queue basse, qu'il est venu vers moi ... comprenant enfin que je commençais à en avoir plein le cul de son comportement d'enfant unique gâté habitué à ce qu'on l'encense et qu'on lui passe tout. Nous avons joué, il a gagné [au moins, nous pourrons donc y rejouer à ce jeu] et puis, il a fallu regarder une merde à la télé parce que les films avec François Damiens c'est toujours tellement bien.

Finalement, en allant nous coucher, il m'avoua être émerveillé que j'arrive à le supporter. Lui rappelant quand même que je ne comprenais pas l'intérêt de me faire chier avec des questions sans intérêt, il ne trouva rien de mieux que me dire qu'il trouvait intéressant de me challenger. Me challenger ... c'est bien cela, je suis un objet d'étude de son boulot en fait, il me traite comme un dossier. Oui, je te l'avoue ... cela m'a achevé.

Ah non, ce qui m'a vraiment achevé, c'est qu'il s'est relevé vers 23h40 pour aller acheter des places de spectacle pour Londres [bah oui, tu comprends, ... un dimanche soir vers minuit, c'est normal]. J'ai profondément soupiré et balancé froidement "A demain" tout en me retournant. C'était sans compter qu'il me réveillerait vers 04h50 au doux son persistant de ses ronflements pour lesquels il a décidé de ne rien faire depuis des années [là aussi, la qualité de l'entente est remarquable et qu'importe que cela me ruine ma santé et mon sommeil].

En réalité, en repensant à tout cela, je ne vois qu'une évidence : il ne m'écoute pas beaucoup et n'entend que ce qu'il veut entendre. Alors oui, me challenger est un jeu et quand je suis trop gênant, il trouve une façon de s'isoler pour faire ce qui l'amuse avec son téléphone ou autre [je refuse d'aller chercher quoi, ça pourrait me mettre dans une telle fureur qu'il pourrait passer un sale quart d'heure]. Alors oui, c'est bien beau de me reprocher de ne pas dire grand chose mais quand tu as si peu le sentiment d'être entendu et qu'un tel aléa au sujet de l'écoute existe, il est bien évident que je n'ai pas pour objectif de gaspiller mon énergie à parler à un mur ...

Parce que si tel n'avait pas été le cas, on aurait réservé deux places de concert pour un truc que je voulais voir mercredi [auquel je n'ira finalement pas ... par principe], on aurait trouvé le temps d'aller nous balader en forêt, on aurait bouclé Londres et discuté enfin des prochaines grandes vacances. Ce n'est pas comme si je n'avais pas dit que je voulais que l'on fisse tout cela hier ... mais non, c'est tellement plus amusant de me "challenger" [traduction : me faire tourner en bourrique], de me faire attendre ... On dit souvent que la santé d'un couple se mesure à la propension dont il dispose à dialoguer. Mais dialoguer si l'on n'est pas entendu, c'est un peu stérile. Et dialoguer suppose tout de même que l'on écoute l'autre. Je ne dis pas que je vis un enfer, je dis simplement que la vie à deux est plus simple quand les deux la facilitent.

"Je me demande si j'ai tout bien fait pour toi ce wikende" m'a-t-il lancé dimanche soir, comme dans une posture de contrition. J'ai préféré ne pas répondre ... je ne pense que j'aurais été entendu.

Tto, pas franchement muet mais qui en a l'impression