Le meilleur polar US depuis longtemps

Les scénaristes des shows politiques n'y seraient pas arrivés aussi bien, les angles n'auraient jamais pu être dénichés avec autant de saveur s'il s'était agi d'un épisode de "House of cards" et finalement la gestion des personnages de "Game of Thrones" est un peu trop linéaire comparée à cette élection présidentielle dont tout le monde se réjouit qu'elle s'achève aujourd'hui [normalement] par le fameux "Election day" !

Ah oui, ça ... on a hâte que cela se termine. Les américains n'en peuvent plus, et tout le monde dégobille des outrances d'un Trump en roue libre et des omissions d'une Clinton qui n'a pas pris la mesure de la défiance, pensant probablement que le seul fait d'être une alternative suffirait. Il en résulte un pays fragmenté, ce qui est assez inquiétant mais pas exclusif aux États-Unis [ce qui n'en est pas moins inquiétant également].

Plutôt que de t'abreuver d'une analyse politique qu'il sera temps de faire demain, à la lecture des résultats, j'ai choisi de me concentrer sur la nuit américaine que toi et moi allons vivre. Les règles du jeu, les conditions de victoire de l'une et de l'autre et quelques bizarreries savoureuses qui font le sel des processus électoraux un peu partout dans le monde. Welcome for the election day 2016, may be one of the toughest ever experienced but I'm so thrilled !!!!

Alors déjà, pourquoi un mardi déjà ? C'est vrai ça ... élire l'homme ou la femme la plus puissante du monde un mardi, c'est assez bizarre quand on y pense alors que partout dans le monde cela se fait un dimanche ou un jour chômé. En fait, tout cela remonte à 1848 : au moment de rédiger la Constitution des États-Unis à l'été 1787, la question du jour du vote n'est pas tranchée, les rédacteurs manquant de temps. Ainsi, les États sont libres d'organiser le scrutin sur une période de 34 jours avant le premier mercredi de décembre, date à laquelle les grands électeurs du collège électoral se rassemblent. Très vite, c'est le grand n'importe quoi et la fraude bat son plein : les partis montent, par exemple, des gangs de militants qui se déplacent d'État en État pour voter ! C'est moche ... Le Congrès décide de se pencher sur la question en 1845 et s'oriente alors sur un unique jour de scrutin sur tout le territoire. Il opte pour le début novembre parce que les moissons sont terminées et parce que la neige n'a pas encore rendu les routes impraticables. Qui dit jour unique, dit choix et là aussi, il a fallu tenir compte des contraintes logistiques de l'époque. Pour rappel, en 1845, on se déplace à cheval, en chariot, il faut donc laisser le temps aux électeurs de parvenir au bureau de vote. Société agricole alors, les fermes peuvent être assez éloignées des villes de sorte qu'il faut compter un jour de voyage à l'aller, un jour pour voter et un jour pour rentrer à la maison ! Comme le samedi est un jour de travail ordinaire et que le dimanche est un jour du culte, c'est totalement inenvisageable. Évidemment et comme tu l'as compris, le lundi ne peut être retenu puisqu'il aurait supposé de partir le dimanche, espèce d'impi !! Le mercredi n'est pas plus réaliste puisqu'il est un jour de marché ... Finalement, le mardi en revanche apparaît comme un bon compromis puisqu'on part le lundi et on est de retour chez soi pour la fin de la semaine. 

Ensuite, l'élection ... comment ça marche ?
Les conditions d'éligibilité au poste de président des États-Unis sont définies par le cinquième alinéa de la section de l'article II de la Constitution [ça c'est pour ton prochain cocktail ... ça va la scotcher la connasse qui t'explique qu'elle a lu Le Monde Diplomatique].Ne peuvent se présenter que les citoyens américains de naissance âgés d'au moins 35 ans. Il faut en outre qu'ils aient résidé pendant au moins quatorze ans aux États-Unis. À l'origine, il n'était pas prévu de limite au renouvellement du mandat du président. C'est le XXIIe amendement de la Constitution des États-Unis, adopté par le Congrès des États-Unis en 1947 et ratifié en 1951, qui instaure de manière officielle cette limitation à deux mandats, à la suite de la troisième élection de Franklin Delano Roosevelt en 1944 [ils ont eu peur qu'un nullissime se fasse élire trois fois à nouveau ... George W si tu me lis, Afida Turner t'embrasse].

L'élection présidentielle américaine est une élection à suffrage universel indirect. Les citoyens électeurs américains élisent des grands-électeurs, qui vont eux-mêmes voter pour un candidat précis. Les 538 grands électeurs sont répartis à travers les différents États selon une clé de recensement démographique arrêtée en 2012 jusqu'en 2020. Dans chaque État, la majorité simple suffit pour emporter la totalité des grands électeurs, à l'exception du Maine et du Nebraska, c'est la règle du "winner-takes-all". Tu l'as déjà compris, pour l'emporter, un candidat doit remporter la majorité des 538 grands-électeurs, c'est-à-dire 270 grands électeurs. Sur la carte ci-contre, tu vois bien quels sont les États qui polarisent le plus d'attention !

Voici les positions Trump / Clinton selon les derniers sondages : en rouge vif et rouge clair, c'est Trump et plus c'est foncé plus il est assuré d'emporter les grands électeurs. A l'inverse, en bleu vif ou clair, c'est Clinton et là aussi, plus c'est foncé plus elle est assurée de capitaliser les grands électeurs. En jaune, c'est le nerf de la guerre : ce sont les "swing states", ceux qui peuvent tout faire basculer. Ainsi le Nevada, l'Arizona, le Tennessee, le New-Hampshire et évidemment la Floride !

Si tu veux suivre l'élection, tu as le choix : les chaînes de télé françaises vont faire des éditions spéciales toute la nuit [sauf sur I>Télé, merci Bolloré]. Les radios aussi sont sur le pont et Twitter va s'enflammer vers 3h du matin, heure à laquelle une première vision sera disponible. Et c'est là que je vais encore t'aider ...

En fait, on va savoir très vite dans quel sens tournera le vent. Donald Trump doit absolument gagner la Caroline du Nord et l'Arizona comme Mitt Romney en 2012 mais il doit également faire basculer l'Iowa, l'Ohio et la Floride qu'Obama avait remporté en 2012 sans que cela ne suffise puisqu'il lui manquerait alors 10 grands électeurs. Ces dix grands électeurs peuvent se trouver dans le New-Hampshire et le Nevada qui sont très incertains. Ne pas gagner la Caroline du Nord impliquera de gagner absolument la Pennsylvanie et le Michigan. Le Colorado est également crucial pour maximiser ses chances déjà assez minces.

Du côté d'Hillary, la question est celle du "mur bleu" afin de savoir si ce dernier va tenir. Il s'agit des Etats de Pennsylvanie, du Michigan et du Wisconsin qui bordent les grands lacs. Trump le sait et accentue la pression pour faire céder ces Etats traditionnellement démocrates. Clinton, si elle maintient le mur bleu, ne devra plus que concrétiser dans l'Ohio ou la Caroline du Nord ou encore la Floride. Autant dire qu'elle a moins de chemin à faire ... l'ABEE sera moins compliquée à rencontrer d'autant qu'elle semble promise à agréger les votes féminins, latinos, et afro-américains.

Cette nuit, Hillary a déjà gagné le premier match, celui de Dixville Notch, petite ville du nord du New-Hampshire. ... c'est traditionnellement la première à se prononcer dans ce fameux Election Day ! Elle avait voté pour George W Bush en 2000 et 2004, pour Barack Obama en 2008 ... mais bon, les oracles ne sont pas toujours exacts : en 2012, la ville avait voté pour Romney !

Tto, on the edge

ABEE : Substantif féminin - Technologie (moulins à eau).
1 Ouverture pour le passage de l'eau qui fait mouvoir un moulin.
2. Canal de décharge pour l'écoulement de l'eau quand un moulin ne tourne pas.

Comments

[jany]

Merci Tto il me manquait quelques éléments

[Missisa78]

mot du jour : Pyrauste