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une vie de tto
9 décembre 2014

La haine des homos

HOMOS LA HAINE

Je rappelle toujours et souvent ce que la soeur de mon Pôpa a dit lorsque ma Môman lui a appris que je préférais sucer des bites plutôt que reluquer les paires de mamelles : "Oh bah, il en faut bien un dans la famille !" ... Avec quelques autres dérives du langage comme "Le PACS, et pourquoi autoriser les animaux à se marier tant qu'on y est ?" [qui a mis fin à mon expérience de prof en fac tant cette position du Maître de conférences ne pouvait rester sans rectification], comme "Oui, je trouve que ce débat sur l'homoparentalité, c'est révélateur d'un tel égoïsme de ces gens là" [que j'ai entendu dans mon propre bureau il y a un an], comme "Je ne comprends ces gens qui sont bisexuels, c'est comme s'ils changeaient de sexe" [que l'on m'a rapporté] ....

Oui voilà, depuis qu'un grand con m'avait affiché devant tout le monde en cour de récréation en hurlant que j'étais un "sale pédé" [alors qu'à l'époque je sortais avec une fille mais j'avais réussi à ne pas venir en cours de sport et ça, c'était parait-il très symptomatique], voilà seulement les quelques réactions auxquelles il a bien fallu que je me frotte. Et en fait, c'est en commençant à vivre avec Zolimari que j'ai touché du doigt l'homophobie et la haine de celui qui n'est pas normal, comme ils disent.

Moi, j'ai toujours vécu ma sexualité de façon simple : prendre l'amour d'où qu'il vienne. C'est pourquoi, j'ai couché avec des femmes quand j'étais attiré par elles tout en sachant pertinemment que les garçons ne me laissaient pas indifférent [et j'avais franchi le pas avec eux à l'âge de la majorité dite sexuelle ... pour voir]. Par la suite, je suis allé là où mes envies me portaient, sans me poser de questions. Certes, la pression sociale ne m'a pas incité à extérioriser outre mesure [l'aurais-je fait ?], mais oui, j'ai acquis avec le temps un détachement évident sur cette question ... rendant finalement les choses on ne peut plus simples pour moi parce qu'annoncer que je vis avec un homme est d'une telle banalité qu'elle ne suscite pas de réactions particulières affichées [je ne suis pas dupe]. Oui, je crois énormément que chacun conditionne en partie la réaction qui lui est opposée. En partie ...

Zolimari a, quant à lui, toujours essayé d'être le plus transparent possible dans le sens de la neutralité jusqu'à l'asexualisation. Pas de bisou dans la rue, un coup d'oeil autour à chaque fois que nous nous rapprochons ... bref, la terreur d'être démasqué. Et c'est cette épouvante qui m'a beaucoup marqué lorsque notre histoire a commencé parce qu'il a fallu que j'anticipe ce problème qui n'en était pas un, que j'évite de stigmatiser pour rigoler les tapettes et que je sois vigilant à rectifier cette propension qui était la sienne à se croire malade et anormal.

Que certains n'aiment pas les homosexuel(le)s n'est, selon moi, pas une question abordable au même titre que l'on trouve ahurissant de considérer qu'on peut ne pas aimer les noirs ou les asiatiques. Que des questions en viennent à se poser sur les droits à accorder aux pédés et aux gouines me fait toujours autant froid dans le dos, surtout quand je me souviens avec qui j'ai pu coucher jadis, ces bons pères de famille qui adoraient se faire embrocher avant de rentrer chez eux et reprendre leurs vies propres et disciplinées que la messe du dimanche accréditait. Il est aberrant que l'on vienne me dire que je suis anormal et potentiellement nuisible bactériologiquement parce que je préfère vivre avec un homme alors que mes semblables soi-disant ou réellement hétérosexuels vivent dans l'infidelité et le mensonge bien plus que moi et sont bien plus infectés sauf que eux, l'apparence les adoube d'une normalité sociale les exonérant d'avoir à se justifier. En fait, c'est ça le vrai sujet : d'avoir à se justifier alors qu'on aime comme les autres.

Le fait d'être la matérialisation de refoulements ou de peurs irrationnelles rend les gens haineux et replonge alors dans les tourments d'un fascisme intellectuel que Savonarole n'aurait pas désapprouvé. J'ai souvent eu ce débat avec des gays engagés ne comprenant pas ma passivité sur ces situations révoltantes. Moi, plutôt que de démontrer à outrance en montant sur un char, j'ai toujours choisi d'oeuvrer dans l'ombre. Ainsi ai-je passé une après-midi avec un jeune musulman pratiquant de 18 ans qui n'acceptait pas d'avoir envie de me montrer son sexe et d'être excité ... nous avons beaucoup parlé, je lui ai fait sortir tout ce qu'il avait dans la tête pour qu'au final il fasse ce qu'il avait envie de faire et me dise, plusieurs mois après, que je l'avais vraiment aidé ce jour là à prendre conscience de lui-même et non pas se brimer comme sa famille ou quelques prédicateurs pouvaient le faire. Curieusement, j'ai eu aussi la même expérience avec un juif un peu plus âgé qui était dégommé d'angoisses parce qu'il se masturbait en pensant à des petites frappes de banlieue [comme quoi ...].

Il y a 36 façons de lutter contre l'homophobie et le rejet, parce qu'il y a, au moins, 36 situations différentes. Moi, j'ai la mienne et je crois qu'elle fonctionne bien puisque Zolimari s'affiche aujourd'hui, explique [pas encore à tout le monde, mais ça vient] que je fais partie de sa vie, accepte d'être un homme qui en aime un autre sans être inexorablement condamné aux électrochocs, se projette dans l'avenir à un point que tu n'imagines pas. Lui comme moi avons pris en pleine tête les débats, les admonestations en "sous-homme", les réquisitoires de valeurs, les jugements péremptoires nous disqualifiant de toute dignité ... J'ai la chance de l'avoir et lui de m'avoir, si bien que nous avons passé cette étape, que nous avons franchi des obstacles insurmontables pour lui il y a encore quelques temps ... parce qu'à deux, on est plus forts.

C'est en cela que j'envisage la cruelle difficulté de ceux qui sont seuls, de ceux qui se cachent des autres et d'eux-mêmes parce que ce passage initiatique est redoutable. C'est à eux que je tends la main régulièrement [qu'ils aient 18 ans ou 40 comme cela arrive parfois], c'est à eux que je pense quand j'entends des horreurs homophobes [n'oublions pas aussi l'homophobie et/ou l'intolérance développée(s) par certains homos également, probablement la plus incompréhensible], c'est à eux qu'il faut se consacrer pour les aider à sortir de cette ornière, de ce piège dans lequel tant se sont abîmés comme des navires qui gisent au fond sans espoir de remonter. Tant de vies et d'espoirs gâchés sur l'autel d'un conformisme moral hypocrite m'a toujours révolté et c'est pour cela qu'il faut que tu regardes ce soir à 22h45 "Homos, la haine" sur France 2.
Regarde la violence, regarde la cruauté de ceux qui disent aimer et qui châtient dans la fureur et au nom de valeurs qu'ils trahissent. Regarde tout ce à quoi tu as échappé et considère, quoi que soit ta situation pour autant qu'elle ne soit pas aussi dramatique que celle des neufs témoins, que tu as beaucoup de chance de vivre en 2014 sans avoir connu cela. Je comprends que certains homos aient la haine ... Je l'ai eue quand j'ai appris le suicide de ce garçon qui se croyait trop différent, ce jeune homme qui était persuadé que les insultes à son encontre étaient fondées, qu'il était une honte, qu'il était responsable des larmes de sa mère. J'ai ressenti de la haine quand on écoutait religieusement son frère [qui ne rechignait pourtant pas à se faire sucer par une bouche mâle] l'accabler d'instabilité comportementale. Oui ... mais la haine ne change rien. C'est d'abord à chacun de ne pas laisser éteindre en lui-même cette flamme qui fait que tout le monde est normal, qu'aimer quelqu'un du même sexe que soi est tout aussi normal qu'aimer quelqu'un du sexe différent puisque c'est aimer tout simplement. Quand le vent souffle trop fort et menace d'éteindre cette petite flamme, il a des grands frères comme moi et tant d'autres qui sont là pour abriter, sur lesquels on peut s'appuyer ...

L'homophobie existe et a encore de beaux jours devant elle ... Les soixante minutes du documentaire "Homos, la haine" ne permettent pas d'en douter, ni du fait qu'il va bien falloir que cette homophobie soit un jour éradiquée quand elle ne sera plus alimentée par la haine ordinaire et bête.

"Dis Mamie, pourquoi Ttoton et Zolimari ils ont pas une petite fille comme moi ?" a dit ma nièce Ninette il y a dix jours ... Le seul fait qu'à trois ans et demi elle pose la question de la normalité ainsi me fait tellement espérer que je me dis qu'on va finir par y arriver.

Tto, qui te conseille de bien regarder la télé ce soir

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Commentaires
N
Absent hier... je découvre ton post!<br /> <br /> je vais tâcher de le voir en replay
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K
J'ai surtout adoré le témoignage intelligent de la fille de bonne famille filmé aux Tuileries. Mériterait une émission à elle seule !<br /> <br /> En revanche. FR2 qui enchaîne sur une émission sur la "sexualité hors du couple"... Bonjour les amalgames dans les chaumières
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M
C'est un documentaire extrêmement dur, et heureusement que tous les homos ne vivent pas cela. Mais il est symbolique de la régression actuelle et de la montée (ou au moins de l'assurance) de mouvements réactionnaires extrêmement violents.<br /> <br /> <br /> <br /> En même temps, il renforce mon engagement à gauche. Il prouve l'importance de parvenir à changer la société, à parvenir à lutter contre les préjugés. Il montre combien l'éducation à la différence est fondamentale et sans doute trop peu développée.
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E
Toujours aussi percutant ! <br /> <br /> PS : je n'ai pas compris le premier entre crochets.
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K
Je connais un intervenant de l'émission de ce soir qui m'a dit le plus grand bien de la FAÇON dont ça a été tourné. Rien que ça est un bon point. On verra hélas l'audience :-(
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